mercredi 19 mars 2008

Altérité culturelle : la condition de la femme (2)

La grande autonomie des femmes occidentales continuent d'entretenir la curiosité des voyageurs musulmans. Le contenu de leurs commentaires laissent transparaître l'importance du choc culturel. La visite dans les pays du "dâr el kufr" débouche sur une critique à peine voilée de la virilité des hommes et de la frivolité des moeurs féminines habitant dans ces contrées "hostiles" à l'islam.

[...]L'ambassadeur marocain al-Ghazzâl, au cours de son voyage en Espagne en 1766, est consterné, comme d'autres de ses coreligionnaires, par l'indépendance des femmes européennes, et même espagnoles, qu'il associe dans son esprit à la liberté sexuelles. Il reçoit son premier choc dès son entrée dans Ceuta, port espagnol sur la côte marocaine.



" Les appartements ont des fenêtres donnant sur la rue et auxquelles les femmes se tiennent constamment, occupées à saluer les passants. Leurs maris les traitent avec les plus grands égards. Elles adorent d'ailleurs causer ou être à table, soit en tête à tête, soit en compagnie, avec d'autres hommes que leurs époux. Elles ont toute liberté d'aller où bon leur semble. Il arrive souvent qu'un chrétien rentrant chez lui trouve sa femme ou sa soeur en compagnie d'un chrétien étranger, buvant avec celui-ci, les deux convives appuyés l'un contre l'autre. Il s'épanouit d'aise à ce spectacle et estime que cet étranger fait une politesse à son épouse ou à toute autre femme de sa maison..."[1]






L'indépendance et le pouvoir des femmes en France impressionnèrent également Mehmed Efendi [Ambassadeur Ottoman en France sous la Régence]:




" En France, les hommes ont beaucoup de respect pour le sexe ; les plus grands seigneurs feront des honnêtetés incroyables aux femmes du plus bas état, de sorte que les femmes font ce qu'elles veulent et vont en tel lieu qu'il leur plaît ; leurs commandements passent partout. On dit aussi que la France est leur paradis, parce qu'elles y vivent libres de toute peine et de tout soin et que, quelque chose qu'elles puissent désirer, elles l'obtiennent facilement"[2]>>



[1]Gazzal p.12 ; cf H.Pérès, L'Espagne revue par les voyageurs musulmans de 1610 à 1930, Paris, 1937, p.32

[2]Mehmed Efendi Le Paradis des infidèles, présenté et annoté par Gilles Veinstein, Paris, Maspero,1981 p.135

cité in Bernard Lewis, Comment l'islam a découvert l'europe, 1982 pp.274-275



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