mercredi 29 novembre 2006

Tolérante al-Andalus : une société raciste et esclavagiste(1) ?

« Quant au marchand d’esclaves, il baigne quatre heures durant une esclave un peu trop basanée dans une préparation destinée à lui éclaircir la peau et utilise divers procédés pour fabriquer des fausses vierges. D’autres recettes relèvent moins directement du registre de la fraude, mais sont tout aussi pittoresques : on épile la jeune esclave avec de la chaux vive, des oeufs ou larve de foumi-sans doute en onguent- de l’huil où l’on a fait cuire des grenouilles ou des salamandres, on parfume les aisselles avec diverses préparations à l’eau de rose, on utilise des pâtes pour supprimer ou éclaircir les taches de la peau et les grains de beauté.Avec le commerce des esclaves, on touche à une autre dimension des activités commerciales, celle des trafics à longue distance de denrées de prix élevé, que nous connaissons en fait beaucoup moins bien que les activités journalières des souks »

Pierre Guichard Al-Andalus une histoire de l'Andalousie arabe 711-1492 p.163




Extrait d’une théorie de hiérarchisation des peuples selon le climat par Sa’id al Andalousi, cadi de la cité musulmane de Tolède au XI siècle :


« Entre le dernier des septs climats et les limites du monde habité, la distance excessive du soleil à la ligne du zénith rend l’air froid et l’atmosphère épaisse. De là viennent à ceux qui habitent le plus au nord un tempérament frigide, des humeurs âcres, un ventre bouffi, une coloration pâle et de longs cheveux plats. Il leur manque l’acuité de la compréhension, la clarté de l’intelligence, et c’est pourquoi ils baignent dans l’ignorance et l’apathie, l’absence de discernement et la stupidité. Tels sont les Slaves, les Bulgares et leurs voisins. A l’opposé, au voisinage et au-dessous de la ligne d’équinoxe, vers le sud, la longue présence du soleil au zénith rend l’air chaud et l’atmosphère ténue. C’est pourquoi les peuples qui vivent là ont le tempérament chaud et les humeurs ardentes, une couleur noire et des cheveux laineux. Il leur manque la maîtrise de soi et l’églité d’humeur, et ils sont dominés par l’inconstance, la bétise et l’ignorance. Tels sont les Noirs qui vivent aux limites de l’Ethiopie ; les Nubiens, les Zanj et leurs pareils. »

Sa’id Al-Andalusi, Tabaqat al-Umam, Paris, 1935 p.37,38

Tolérante Al-Andalus : une société d'apartheid (2)?



Dans tout cet ensemble de lois, la pire est sans doute le rituel imposé pour le paiement de la capitation, tel qu’il est décrit dans un manuscrit arabe conservé à la bibliothèque de l’Escurial, pour les dhimmi qui vivent non dans une zone ou ville autonome, mais dans le dar al-Islam, comme membre d’une communauté infidèle dans un quartier urbain, dans un faubourg ou à la campagne. Ce paiement a lieu à jour fixe, une fois par mois, en public. Les musulmans qui assistent à cette séance ont le droit de bousculer et rudoyer l’infidèle qui vient « faire acte de soumission » en payant son tribut personnel ; ils cirent effectivement à cet « impie » : « Oh ! Ennemi d’Allah, paye la capitation ! » C’est une sorte de spectacle. Chacun de ceux qui doivent payer est tenu de se présenter personnellement, ne pouvant envoyer un émissaire à sa place : il doit donc entrer dans la pièce où se trouve le percepteur musulman, qui se tien normalement assis à l’orientale, sur une natte ou un tapis ; il doit rester debout devant lui ; puis, en lui tendant son argent[65] Ce cérémonial s’applique d’une manière relativement enjouée et non dénuée d’une certaine camaraderie condescendante. Il n’ en est pas moins humiliant. Mais est-il souvent en vigueur ? On peut se le demander car les impôts sont parfois affermés ; il est vrai que l’affermage ne semble effectué que pour la contribution foncière ; la capitation payable en numéraire et suivant un tarif fixe, a pu facilement échapper à ce mode de perception. Quant aux préposé aux impôts, dans les communautés de dhimmi, ils semblent avoir été des comptables-et agents recenseurs-, plus que des percepteurs à proprement parler.Tout ce qui touche à l’essentiel, c’est-à-dire à la religion, est entouré de règles strictes et d’interdits. Si dans un ménage chrétien, la femme se convertit à l’Islam, le mariage est automatiquement rompu ; au contraire si c’est le mari qui devient musulman, sa femme, même si elle reste chrétienne, est obligée de rester son épouse.Un chrétien ne peut hériter d’un mahométan, sauf,-nous l’avons dit- s’il est esclave et si c’est son maître qui lui fait un petit legs en mourant. Si l’esclave d’un dhimmi se convertit à l’Islam, il doit être immédiatement vendu à un musulman. Un infidèle ne peut avoir à son service aucun mahométan, même comme salarié. Il est interdit aux chrétiens d’apprendre le Coran et d’en parler à leurs enfants, de même qu’il leur est défendu de parler du Christ avec des musulmans. Si l’Islam admet que ces « polythéistes » gardent des églises, ils n’ont pas pourtant pas le droit d’en construire de nouvelles, ni de nouveaux couvent ou ermitages ; ils ne sont pas davantage autorisés à surélever leurs anciens édifices religieux ; ils ont seulement le droit de les maintenir en bon état, mais il ne leur est pas permis de réparer ceux d’entre eux qui se seraient détériorés, surtout s’ils sont dans un quartier musulman. Tout est prévu dans le moindre détail : il est interdit de remplacer dans ces édifices, des murs ou constructions de brique crue par des éléments en pierre ; si une église était en construction avec une façade inachevée au moment de l’incorporation de son territoire au dar al-Islam, la façade ne doit pas être terminée ; seuls des achèvements intérieurs sont possibles ; ne sont licites que des « surélèvements de portes d’églises », « s’ils sont rendus nécessaires par un exhaussement du sol »[66]Eglises et chapelles doivent être ouvertes constamment, de jour et de nuit ; les voyageurs musulmans qui le désirent doivent y être logés et nourris durant trois jours. A l’intérieur d’un église, on ne doit sonner cloches et clochettes que très doucement, « en faisant le moins de bruit possible », et il est interdit de « trop élever la voix » en priant, surtout si un musulman se trouve l’édifice.Aucune croix ne doit être placée à l’extérieur d’aucun bâtiment. Quand les prêtres se rendent au domicile d’un mourant ou d’un malade, ils ne doivent transporter d’une manière visible ni croix ni Evangiles, s’ils passent par des rues ou des chemin que des musulmans peuvent fréquenter. Lors des cortèges funèbres qui ne peuvent jamais être pompeux, les prières n’ont pas être dites à haute voix, et les cierges allumés sont prohibés dans les rues où vivent des musulmans. Il faut voiler le visage du défunt qui est transporté suivant l’usage médiéval sur un « brancard mortuaire ». Les chrétiens doivent être enterrés dans des cimetières qui leur sont propres, éloignés de ceux des musulmans, mais leurs familles sont parfaitement libres de placer sur les tombes des inscriptions religieuses en latin[67]En aucune circonstance et sous aucun prétexte, des processions chrétiennes ne peuvent passer dans des rues musulmanes ni dans les souks, avec des statues, des palmes, des cierges ou des chandelles. D’aucune manière, un « polythéiste » ne doit tenter de propager ses erreurs religieuses auprès des musulmans. D’ailleurs, un mahométan qui devient chrétien est immédiatement condamné à mort, même s’il est un ancien chrétien qui s’était provisoirement converti à l’Islam. Est aussi passible de la peine de mort tout chrétien, homme ou femme, qui nie la divinité d’Allah en prétendant que Jésus est Dieu, en disant de Mohammed qu’il est un faux Prophète, en dénigrant le Coran, ou en blasphémant[68]Bien que tout soit fait pour éviter promiscuité et contacts entre musulmans et chrétiens, des relations de coexistence s’établissent qui peuvent conduire à des querelles ; les deux parties en présence ne sont pas alors jugées suivant les mêmes critères : un dhimmi qui tue un mahométan peut être condamné à mort, quelles que soient les circonstances du meurtre, tandis qu’un croyant qui assassine un infidèle n’est passible de mort que s’il est convaincu de préméditation et de perfidie. Si, pour un tel meurtre, un musulman est condamné à verser une indemnité à la famille de la victime chrétienne, cette compensation est chiffrée à quatre cents dirhem ; mais s’il en acquitte une pour avoir tué un musulman, elle s’élève au double[69]En matière de droit civil, il existe également des critères de différenciation : en aucun cas, par exemple, un chrétien ne peut se rendre acquéreur d’un esclave capturé par des croyants ; et des associations commerciales entre dhimmi et musulmans ne sont possibles qui si leur direction appartient à l’un de ces derniers[70]Ainsi, toute une série de prescriptions variées régit les rapports entre infidèles et croyants. Leur nature religieuse les insère dans la Loi inflexible et inéluctable. Le plus grave est qu’elles suscitent parfois la haine et la violence contre les « protégés ». Il arrive, ici ou là, qu’une foule musulmane, où les néo-convertis se distinguent par leur arrogance, insulte et trouble des célébrations du culte chrétien, surtout les enterrements , au passage de ces cortèges funèbres, s’élèvent parfois des cris passionnés dictés par l’aversion : « Allah ! Ne sois pas miséricordieux à ces infidèles ! » Les plus excités lancent des pierres et des immondices vers le brancard mortuaire et vers les prêtres. Quand ceux-ci se déplacent isolés, ils sont parfois pris à partie par la populace, surtout par les enfants, qui s’amusent à leur jeter des pierres, en chantant quelque couplet burlesque tournant la croix en dérision[71].Certes, l’Islam n’admet pas ces excès et, en général, les autorités veillent au respect du statut des dhimmi, mais les simples transforment aisément le mépris condescendant en hargne déchaînée.


Charles emmanuel Dufourcq La vie quotidienne dans l’Europe médiévale sous domination arabe » p.161-168


[65] Simonet p.92

[66]Ibid. p.81,94,96,802 ; Amari : I, 620 ; Idriss : 178-179

[67] Simonet p. 84, 624, 802-803; Amari : I,p.618-620

[68] Simonet p. 85, 88, 802 ; Idriss p.171et 195

[69] Simonet p. 98

[70]Ibid. : p. 804

[71]Ibid. : p. 364

Tolérante Al-Andalus : une société d'apartheid(1) ?






« Les contacts des musulmans avec les chrétiens paraissent avoir été relativement limités », remarque Pierre Guichard[45]. Ce n’est pas étonnant. Les mahométans les plus croyants s’abstiennent toujours de parler à des « infidèles » ; si cela est inévitable, enseigne un faqi, il faut leur adresser la parole à distance, en prenant soin de ne pas frôler leurs vêtements[46]
Le fameux Malek ibn Anas(mort en 795), cadi de Médine, dont les préceptes sunnites, le malékisme, ont été suivis et utilisés comme règles de vie en Espagne, a défini de quelle manière le croyant (en Allah) doit se comporter. Interrogé pour savoir si l’on pouvait manger avec un « infidèle », il avait répondu : « Ce n’est pas défendu ; mais personnellement je ne cultuiverai pas l’amitié d’un chrétien »[47]
Dans une précieuse étude analytique de consultations juridiques, données par des muphtis de l’Occident musulman, l’un de nos islamologues actuels, H.R. Idris, a rassemblé une gerbe de citations instructives ; tel faqi affirme : « Mieux vaut ne pas fréquenter les gens d’une autre religion » ;et il précise on peut rendre service à un dhimmi et lui parler avec gentillesse, mais « non avec déférence ». Un autre « docteur de la loi » musulmane indique à l’un de ses coreligionnaires qui lui demande conseil : « Si un dhimmi te salue en disant : « Que le salue soit sur toi ! », réponds-lui « Sur toi ! », et rien de plus[48] »
D’ailleurs, il est interdit aux « infidèles » d’utiliser les mêmes formules de salutation et les mêmes paroles que les mahométans. Certes, les relations restent possibles : les muphtis admettent par exemple qu’un musulman puisse avoir un puits en commun avec un chrétien ; l’un deux explique pourquoi : « Ce n’est pas vicieux, car Allah n’interdit pas à ses fidèles de consommer la nourriture des dhimmi[49] »
N’empêche qu’un bon mahométan ne peut se lier avec « un polythéiste ».[50]
Chaque fois qu’un problème lui est soumis à propos de relations avec des chrétiens, tout faqi l’étudie à la lumière de ce verset du Coran, qu’il et toujours prêt à rappeler et commenter ; « Croyants ! Ne prenez pas infidèles pour confidents. Ils ne failliraient pas à vous pervertir : ils veulent votre perdition[51] ! »
Selon le savoir-vivre musulman, si un croyant éternue, son coreligionnaire qui est à proximité doit lui dire : « Qu’Allah ait pitié de toi ! » Mais –nuance- si c’est un dhimmi qui éternue, un musulman doit lui dire « Qu’allah te dirige pas le meilleur chemin ! », ou encore : « Qu’Allah t’améliore ! », phrases à double sens[52]. De même, il est recommandé aux mahométans de ne pas prendre de nouvelles d’un infidèle ni de sa « maisonnée ». Bref, envers juifs et chrétiens, il faut toujours « observer une certaine réserve ».[53]
De surcroît, des prohibitions existent. Il est formellement interdit à tout musulman de faciliter aux chrétiens la célébration de leurs fêtes, notamment de leur prêter ou louer des bêtes de somme à cette occasion[54]. L’Islam édicte de très nombreux préceptes, destinés à éviter que ne soient confondus infidèles et croyants. En Sicile, un indigène chrétien n’est pas autorisé à porter un nom propre en usage chez les musulmans. Dans al-Andalus, on n’admet pas qu’il puisse utiliser un surnom habituel chez les fidèles. En Sicile, les dhimmi sont obligés d’arborer un signe distinctif sur leurs vêtements : une sorte d’écusson ou d’insigne ; leurs turbans, s’ils en portent, doivent être d’une autre coupe ou d’une autre couleur que celles adoptées par les croyants ; si par mégarde, ils ont acquis un turban d’une couleur utilisée par les mahométans, ils ne doivent le placer sur leur tête qu’après en avoir teint autrement l’extrémité visible. Toujours en Sicile, le port d’une très large ceinture est imposé aux chrétiens : en cuir ou en laine, placée sur les habits d’une manière très voyante.
En espagne aussi, les infidèles sont tenus de ne pas avoir de vêtements ayant « la même coupe et la même forme » que ceux des musulmans, ni de chaussures de même type, ni « aucun vêtement luxueux ».[55]
Il est pareillement défendu aux dhimmi de se raser complètement la tête : on ne les autorise à tondre que la moitié antérieure du crâne. Cette curieuse réglementation est à comparer avec l’habitude hispanique des mèches sur le front : on entrevoit une sourde lutte de préceptes et de modes[56].
D’autres prescriptions sont dictées par la méfiance et la fierté : un dhimmi ne doit jamais porter d’épée ni aucune arme, ne pas en fabriquer, ne pas en avoir chez lui, il ne doit jamais discuter le pouvoir musulman ni ses décisions, ni nuire aux croyants d’aucune manière ; il est tenu de dénoncer aux autorités tout projet ou activité anti-islamique(espionnage, conspiration, fraude fiscale) et il ne doit parler qu’avec respect de la loi musulmane[57].
Plus encore : tout chrétien est, en une certaine mesure, au service des musulmans, il a l’obligation de donner l’hospitalité gratuite, avec vivre et couvert, à tout voyageur ou passant mahométan qui la lui demande.[58]
Enfin, de règles vexatoires sont en usage. Un « protégé » ne doit pas monter à cheval ; il lui faut se contenter des mules ou d’ânes ; encore doit-il s’y placer en amazone et non en cavalier, en n’utilisant que des selles et étriers pour animaux de bât et en n’empruntant, quand il est sur une de ces bêtes, que des chemins ou voies peu fréquentés.[59]
Toute infraction est sévèrement punie. Un muphti consulté au sujet d’un chrétien qui avait osé monter à cheval, déclare que ce coupable mérite vingt coups de fouet et un temps de prison[60].
Tout un « code de politesse et de respect » est imposé ; si un chrétien, monté sur une mule ou un âne, est amené à passer devant une mosquée, il doit descendre à terre dès qu’il voit l’édifice et passer devant lui à pied, à tenant sa monture par la bride. Sur la voie publique qu’il soit à pied ou monté, un dhimmi doit toujours céder le pas aux musulmans, en leur laissant le meilleur endroit où circuler. Si des infidèles sont assis en groupe, en plein air ou dans un lieu public, et qu’un musulman passe ou s’approche, entre ou sorte, ils doivent se lever ; ils doivent lui parler avec respect et lui céder un siège le cas échéant. Nulle part un dhimmi ne peut occuper une meilleure place-dans une réunion ou assemblée-qu’un mahométan[61]
Les maisons des infidèles, si elles sont proches des demeures musulmans, doivent être plus basses que celles-ci, car les incroyants ne doivent pas pouvoir regader de chez eux chez des mahométans. Ces maisons de dhimmi doivent porter un signe distinctif, pour que l’on sache qu’elles ne sont pas habitées par des musulmans. Aucune inscprition en caractères arabes ne doit figurer sur leurs portes. Il est de même interdit aux infidèles qui ont des boutiques de placer sur celles-ci des enseignes ou écriteaux rédigés dans la langue du Prophète[62].
Les femmes dhimmi ne peuvent entrer dans un hammam si des musulmanes s’y trouvent, et elles doivent en sortir si des musulmanes y arrivent ; cela est imposé au moins en Sicile[63]. Cette prescription ne semble pas appliquée pour les hommes dhimmi vis-à-vis des mahométans ; pourtant, le moindre contact est frappé d’interdit : « Un musulman qui a acheté un vêtement chrétien ne doit pas le porter quand il fait la prière.[64] » Il est vrai que les contactes impurs qui ont pu souiller le croyant avant une de ses oraisons sont lavés par les ablutions qui la précèdent. "
Charles emmanuel Dufourcq La vie quotidienne dans l’Europe médiévale sous domination arabe » p.161-168


[L'auteur est agrégé d'histoire, docteur ès lettres, professeur du Moyen Age à l'Université de Paris(Nanterre); Il est membre correspondant de la Real Academi de Buenas Lettras]

Notes p. 274 [La présentation des notes a été modifiée par rapport à l'original afin de permettre aux lecteurs de disposer des références complètes des ouvrages cités dans le texte ci-dessus]


[45] : Guichard : al-Andalus,Barcelone, 1976 p.33


[46] : Simonet Historia de los mozarabes de Espagna, Amsterdam, 1967 p.364


[47] Ibid. : p.82


[48] Idriss :"Les tributaires en Occident Musulman médiéval", Mélanges Armand Abel, Leyde,1974 p. 178


[49]Ibid. : p.184


[50]Simonet p. 81


[51]Le Coran : III 114/118


[52]Simonet p. 79


[53]Idriss p. 178


[54]Ibid. : p. 183


[55]Amari Storia dei Musulmani di Sicilia Gallino, 3 volume, Catane 1933-1939 p.55 ; Simonet : p. 79-80


[56]Simonet p.79 -80 cf supra nos page 158 -159 de ce livre


[57]Simonet p. 77, 79 et 80 Amari I,617


[58] Simonet p.92


[59]Ibid. p. 80 Amari I, 167


[60]Idriss : p.172


[61] Amari I, 617 ;II, 619; Simonet : p.80


[62] Amari I, 617 ; Simonet p. 80 -802


[63] Amari : I, 617


[64] Idriss, p.173




Compte rendu de conférence :La montée de l'islamisme dans l'université française





Compte-rendu de la réunion du Cercle Nation et République du 28 juin 2005 : Audition des professeurs Marie-Thérèse et Dominique URVOY







Situation dans l’Université d’Etat présentée par le professeur Dominique Urvoy
Le professeur Urvoy dirige actuellement la chaire de pensée et civilisation arabes à l’Université de Toulouse le Mirail.



Introduction : Peut être définie comme « islamiste » toute conduite visant à substituer les règles de l’islam aux lois de l’Etat. Dans l’Université, cela ne peut se faire par la violence, mais donne lieu à des stratégies d’ « entrisme ».


I Les facteurs de l'entrisme

Les facteurs qui les favorisent sont :

  • -le changement d’origine du personnel arabisant (disparition du vivier que constituait les arabisants du temps de la colonisation d’un côté, immigration de l’autre),

  • -la désaffection du grand public pour le fait arabe facilement associé au terrorisme,

  • -la conversion à l’islam de nombre d’arabisants d’origine « hexagonale »,

  • -enfin, les combines locales jouant sur les avantages que peut apporter la promotion d’un membre d’un parti ou d’un groupe influent en pays arabe.






II Les modalités de l’entrisme sont :

  • -la présentation sous l’étiquette neutre d’ « institut culturel » associés plus ou moins de façon continue à une structure universitaire reconnue,

  • -la mise en place systématique aux postes d’enseignement de l’arabe de membres actifs de mouvements intégristes,

  • -à partir de là, l’établissement de liens avec des individualités d’autres sections.On veut ainsi éliminer toute vision critique et renouveler en France le type d’enseignement des pays musulmans.






La question est double. Au premier niveau, il s’agit d’une subversion des exigences scientifiques reconnues dans notre système universitaire au profit de la perspective purement apologétique qui est de rigueur dans les centres d’éducation musulmans. Plus profondément, cela doit déboucher sur la formation d’un domaine ayant ses propres lois à l’intérieur de l’espace français et européen.










Source : http://www.nationetrepublique.fr/pages/dossiers/france/laicite/islamisme.html

mardi 28 novembre 2006

La dette d'al-andalus vis-à-vis de l'espagne wisigothique (1)



[...]"Un dernier rameau extrêmement ténu mais néanmoins réel, est celui des traductions réalisées dans l'Occident musulman à partir du latin. Elles sont ponctuelles et très dispersées : tables astronomique qui céderont vite devant celles qui viennent de l'Inde ; ouvrages d'agronomie véhiculant l'héritage de Columelle, qui ne sont pas conservés mais qui ont laissé des traces indiscutables dans les traités arabes d'Espagne ; textes d'intérêt historique et géographique, soit tels quels (Orose) soit par fragments(Julius Honorius, Isidore de Séville,....) Au sein de ce dernier courant, la seule trace d'influence philosophique se trouve dans la reprise par Ibn Hazm au XI siècle, de la division de la philosophie selon le modèle d'Isidore de Séville, sans que l'on sache si cela repose sur une traduction ou sur la connaissance du latin par l'auteur arabe."
Dominique Urvoy Histoire de la pensée arabe et islamique, Seuil, Paris, 2006 p.150
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Portrait d'un scientifique islamique : Cheikh Ibn Baz


Dans cet article, il n'est pas de notre propos de traiter de l'état passé ou actuel de ce que l'on appelle improprement la "science arabo-musulmane". En revanche, il convient de pointer du doigt un phénomène en expansion celui de la "science islamique". Phénomène ancien, il consiste à "établir des faits scientifiques" à partir du coran. Evidemment, ce type de procédé donne lieu à des situations ubuesques.
A travers la figure d'un des plus éminents savants musulmans, nous allons voir les contorsions des musulmans(salafistes) pour éviter le ridicule.


Il faut rappeler que feu le cheikh aziz ibn Baz était la figure religieuse la plus élevée du royaume d’'Arabie Saoudite. A la tête du Comité pour la propagation de la vertu et la prévention du vice. Il a été le président de l'université islamique de Médine et le président de la recherche scientifique. En 1982, il reçoit le prix du roi fayçal pour services internationales rendus à l’islam. Il est décédé en 1999. Ses déclarations peuvent être illustrées par des passages du coran, de la sunnah ou de la sîra de mahomet et touchent tous les domaines.

Le "grand astrophysicien" ibn baz, grand mufti d'Arabie Saoudite déclare : "la terre est plate, celui qui déclare qu'elle est sphérique est un athée méritant une punition
De même dans son « Maoussouat fatwas bin Baz »[2]( recueil de fatwas) Ibn Baz déclare que sera passible de la peine de mort :"toute personne qui affirme que le soleil est immobile .En effet, cela revient à infliger un démenti au prophète et à tous les oulémas de l'islam sont d'accord pour considérer que celui qui inflige un démenti à dieu , à son prophète ou à son livre est un impie .Sauf repentir il mérite d'être tue et prive de ses biens"

Mais l'Arabie Saoudite dispose d'autres astrophysiciens disciples du grand mufti.
Ainsi,s on fidèle second Bin Oussaïmine assure pour sa part que la preuve que c’est bien le soleil qui tourne autour de la terre se trouve dans le coran [3]
.Nous retrouvons les mêmes analyses dans les Tafsir de Baidawi ou de Zamakhshari .
Les « théories» de notre homme ont fait les délices de la presse anglaise. On retrouve la condamnation à mort qu’il a prononcé « The earth is flat. Whoever claims it is round is an atheist deserving of punishment” dans l’article de Yousef M. Ibrahim, "Muslim Edicts take on New Force",[4]


Depuis, les musulmans pro ibn Baz tente de nier ses propos en affirmant qu'il s'agit d'un complot chiite et que les propos ont été mal compris[5] tandis que les musulmans anti ibn Baz les rappellent[6] et le définissent comme un odieux innovateur .

Heureusement, malgré les démentis en arabie saoudite on est fidèle au précepte du cheikh.
Ainsi dans les conseils donnés au professeur des manuels saoudiens on peut lire : « Le professeur mettra l’accent sur la course du soleil et sur le fait que les textes du Livre et de la sunna confirment la circulation du soleil, qui le met constamment en mouvement d’un endroit à un autre-il ne reste pas fixe, mais plutôt flottant dans l’espace »[7]




[1]Jararyan Al-Shams Wa Al-Qammar Wa-Sukun Al-Ard(1982) Que l’on peut traduire par « Mobilité du Soleil et de la lune et immobilité de la terre »

[2]édite par la Direction des recherches scientifiques Riyad 1982 .Tome 3 p.157

[3]Majmouh fatawa wa rassaël Mohammed Bin Oussaïmine[ Recueil des décrets et des correspondances de Mohammed Bin Oussaïmine] Tome I, pp73 et 75

[4]The New York Times, February 12, 1995, p. A-14.peut être acheté en ligne sur http://pqasb.pqarchiver.com/nytimes/115831...ke+on+New+Force
Voir aussi l’article du Daily Times http://www.dailytimes.com.pk/print.asp?page=story_19-12-2003_pg3_5 (gratuit journal pakistanais libre)

[5]http://soufi.over-blog.com/article-1078963.html et nouvelle version http://salafs.com/modules/news/article.php?storyid=89 (le complot chiite n'est plus mentionné

[6]http://www.livingislam.org/ibaz_e.html (dans la liste de griefs adressés nous pouvons voir qu’on lui reproche d’avoir remplacé les maison de khadidja par des latrines point 17Replacing Khadija's House with Latrines)

[7]Principes de géographie physique, classe de 5e, 2001, « Introduction »p.7 cité in « La démocratie en danger »p.32
Le livre peut être acheté chez http://www.decitre.fr/service/search/fiche_detail/-/ean-9782911289675/index.dhtml

mercredi 8 novembre 2006

L'islamologue Bernard Lewis sur la "crise " de l'Islam





Entretien - L'Occident ne cesse de s'interroger sur un monde musulman qui apparaît toujours plus opaque et plus dangereux. Nul n'en conteste pourtant la gloire ancienne. Une question ne cesse donc de hanter les esprits : « Que s'est-il passé ? » C'est le titre que Bernard Lewis, un des plus grands spécialistes de l'histoire de l'islam, a donné à un brillant essai qui sort le 11 septembre chez Gallimard/Le Débat. L'auteur l'a commenté, en exclusivité pour Le Point.
Propos recueillis par Marie-Françoise Leclère et Pierre Beylau

LE POINT : Après avoir été, pendant près de mille ans, un centre de civilisation, le monde musulman s'est, écrivez-vous, « appauvri, affaibli, enfoncé dans l'ignorance ». A quel moment se situe le tournant ? Est-il possible de le dater ?
BERNARD LEWIS : Cela n'a pas été un « moment ». Le changement s'est déroulé sur plusieurs siècles. Aujourd'hui, nous pouvons regarder en arrière et essayer de le considérer dans une perspective globale, historique. Evidemment, ce n'était guère possible à l'époque, mais beaucoup de gens s'emploient, désormais, à le faire, dans le monde islamique et ailleurs. Ce changement s'est effectué de diverses manières, à des époques différentes et dans des endroits différents. A la fin du XVIIe siècle, il était général et sans équivoque.

LE POINT : L'âge d'or de l'islam est aussi celui de son expansion. L'islam ne peut-il s'épanouir que dans la conquête ?
BERNARD LEWIS : Le mode d'expansion de l'islam n'est pas du tout limité à la conquête militaire. En Asie du Sud-Est et, dans une très large mesure, en Asie centrale et en Afrique, la propagation de l'islam s'est faite par influence et persuasion.

LE POINT : Pendant des siècles, le monde musulman a été capable d'absorber les idées et les techniques venues de la Grèce, de Rome, de la Chine, de l'Inde. Puis il s'est refermé sur lui-même. Comment l'expliquez-vous ?
BERNARD LEWIS : C'est la question cruciale, à laquelle de nombreuses réponses ont été proposées. Certains imputent la faute à l'islam, ce qui est difficilement concevable, puisque la période la plus créative de cette civilisation correspond à la fois à son apogée et à un temps proche de ses origines. D'autres attribuent le changement à des écoles ou à des interprétations de l'islam dont ils pensent qu'elles ont eu un effet négatif. D'autres encore en voient la cause dans l'interpénétration du politique et du religieux. Comme il en va de la plupart des grandes questions de l'Histoire, il n'y a pas d'explication simple acceptable par tous. J'ai essayé de passer en revue celles qui ont été avancées, en particulier celles des musulmans qui ont un regard critique sur leur société.

LE POINT : Les grandes découvertes et les percées scientifiques ont été l'oeuvre de l'Europe et non du monde musulman, qui semblait, pourtant, plus développé à l'époque. Pourquoi ?
BERNARD LEWIS : Pendant très longtemps, les plus grandes découvertes scientifiques ont été faites dans le monde musulman et non pas en Europe. Les étudiants européens fréquentaient des universités musulmanes en Espagne, en Sicile et ailleurs, et ils apprenaient l'arabe pour lire et parfois traduire d'arabe en latin des textes scientifiques et philosophiques. D'une certaine façon, cela pose plus question sur l'histoire européenne que sur l'histoire musulmane.

LE POINT : Depuis le siècle dernier, le monde musulman a tenté de se moderniser sur les plans technique, politique et militaire. Pourquoi lui est-il si difficile de réaliser une vraie modernisation culturelle, qui est la clé de tout le reste ?
BERNARD LEWIS : Beaucoup d'explications ont été, et sont encore, avancées pour élucider le peu de succès de la modernisation dans ces régions et les performances relativement limitées du monde arabe comparées à celles de l'Occident chrétien. La différence la plus frappante entre les deux, relevée par la quasi-totalité des voyageurs, est la différence de statut des femmes. En 1867, Namik Kemal, comparant le monde musulman et l'Occident, écrivait que le premier était comme « un corps humain paralysé d'un côté ». Parce qu'elle affecte la moitié de la population, et l'éducation de l'autre moitié, cette différence est évidemment de la plus haute importance.

LE POINT : Vous écrivez que, contrairement au christianisme, il n'existe pas dans l'islam de séparation entre le sacré et le profane. Les seules expériences laïques du monde musulman, type Atatürk en Turquie, ont été réalisées contre la religion. L'islam peut-il évoluer sur ce point ?
BERNARD LEWIS : La séparation de l'Eglise et de l'Etat a ses racines dans les Evangiles, mais elle n'a été effective qu'après des siècles de guerres de religion où des chrétiens d'obédiences différentes tentaient d'imposer leur foi et leur autorité ecclésiastique à d'autres chrétiens, par la persécution sur leur territoire ou par les armes à l'extérieur. Les musulmans ont eu et ont encore leurs débats internes, notamment entre sunnites et chiites, mais ceux-ci n'ont jamais, même de loin, approché l'âpreté et la férocité des fanatiques conflits religieux du christianisme. La séparation du spirituel et du temporel a donc été considérée par les musulmans comme un remède chrétien à un mal chrétien qui ne les concernait pas. Certains ont suggéré qu'à l'époque moderne, le monde musulman ayant contracté la maladie des chrétiens, il pourrait songer à s'appliquer leur thérapie.

LE POINT : En Europe, à partir de la Renaissance, l'individu s'est peu à peu libéré des cadres religieux et sociaux qui l'enserraient, et la religion a progressivement été reléguée à la sphère personnelle. L'islam est-il capable de suivre le même chemin ?
BERNARD LEWIS : J'y venais. Les deux endroits les plus intéressants où l'on débat de cette question actuellement sont deux pays musulmans. La Turquie est le seul pays musulman qui ait inscrit la séparation de l'Eglise et de l'Etat dans sa Constitution et qui ait essayé d'instaurer un régime démocratique laïque. Au long des cinquante dernières années, il y a eu quelque assouplissement dans l'application des règles établies concernant l'éducation et la pratique religieuses, mais le principe de base demeure. La politique iranienne est à l'exact opposé et vise au maintien d'un Etat, d'une identité et de lois tous définis par l'islam. En Turquie, les résultats des élections passées ont montré qu'environ 20 % de l'électorat préférerait un Etat religieux. Nous ne savons pas quel pourcentage d'Iraniens souhaiterait vivre dans un Etat laïque, puisque la république islamique interdit l'expression de ce choix. Pendant longtemps, la Turquie a été le seul Etat à avoir, en quelque sorte, privé l'islam de son caractère officiel. On peut maintenant lui ajouter les anciennes républiques soviétiques à population musulmane où ce débat fait rage, et aussi l'Indonésie, où les religions monothéistes, mais non l'islam en particulier, sont religions officielles.

LE POINT : La place de la femme dans la société musulmane explique-t-elle l'inaptitude de l'islam à entrer de plain-pied dans la modernité ?
BERNARD LEWIS : Je l'ai déjà dit, et j'insiste. Cette place des femmes est un élément capital dans la lutte pour la modernité. Les hommes élevés dans le respect de la hiérarchie familiale traditionnelle ne sont pas préparés à vivre dans une société moderne et ouverte.

LE POINT : Le monde musulman actuel recherche un bouc émissaire pour expliquer ses échecs. Pourquoi l'Amérique et Israël ?
BERNARD LEWIS : Oussama ben Laden a maintes fois précisé sa vision de ce combat en appelant ses ennemis des « croisés ». Doit-on rappeler que les croisés n'étaient ni américains ni juifs ? Dans les sociétés fermées d'aujourd'hui, où les gouvernements possèdent ou contrôlent les médias locaux et ont appris à manipuler très adroitement la presse étrangère, les vraies doléances ne sont pas exprimées et l'on a besoin de boucs émissaires. Attaquer l'Amérique et Israël est très commode, d'autant qu'on est certain de susciter ainsi une réaction importante en Europe.

LE POINT : Le phénomène Ben Laden est-il le symptôme de cette incapacité à entrer dans la modernité ?
BERNARD LEWIS : Le phénomène Ben Laden est complexe, mais je ne crois pas qu'il verrait dans cet échec sujet à se plaindre. Sa revendication porte sur les succès et non sur les fiascos de la modernité. Et de ces victoires il rend responsables d'abord les puissances chrétiennes de l'Ouest et, ensuite, ces gouvernants du monde musulman que lui - et beaucoup d'autres avec lui - considèrent comme des marionnettes de l'Occident qui salissent la société musulmane en y introduisant la pourriture et la dégénérescence des moeurs occidentales. La guerre sainte (le djihad), on doit s'en souvenir, peut être légitimement menée contre deux sortes d'ennemis : les infidèles et les apostats. Dans le discours actuel des fondamentalistes islamistes, les apostats sont ces chefs qui portent des noms musulmans et prétendent être fidèles à l'islam, mais qui, néanmoins, détruisent la société musulmane en y important les lois, les habitudes, la morale et les idées de l'Occident

Source : http://www.lepoint.fr/dossiers_monde/document.html?did=115986