Malgré tout son faste et son apparat, l'Empire des sultans ottomans resta, sur un point important, toujours fidèle aux buts des expéditions de brigands déguenillés qui avaient été son point de départ : il était organisé pour le pillage et il subsistait par le pillage. La transformation de Constantinople en une grande métropole fut soutenue par des ressources que seul le pillage au-delà des frontières permit d'obtenir. Devenu maintenant une nécessité, il requérait de vastes armées. Le recrutement pour celles-ci ne pouvait s'effectuer que de deux manières. En premier lieu il était possible de distribuer des fiefs pour récompenser les soldats ; mais l'expropriation des musulmans étant interdite par la Loi Sacrée, il fallait repousser les frontières si l'on voulait disposer de quantités suffisantes de terres, donc, piller davantage. En second lieu, il était possible d'assembler une armée constituée d'esclaves; mais ces esclaves mêmes étaient des trophées que l'on ne pouvait remporter qu'en pillant plus encore. La loyauté et l'enthousiasme de ces deux éléments de l'armée dépendaient de perspectives de pillage toujours renouvelées, et aussi de la présence et de l'obéissance d'une administration serve: et là encore, les raids constituaient la seule solution.
Il s'agissait d'un circuit fermé où tout dépendait d'une réserve inépuisable d'esclaves, de butin et de terres. Compte tenu des techniques relativement grossières et rudimentaires dont disposaient les Ottomans dans les domaines des armées, des transports, des communications et de l'administration, et qui devaient imposer au fonctionnement du système leurs propres limitations, celui-ci ne pouvait se perpétuer. Pourtant, l'abandon de cette politique de pillages était impensable ; un retrait en deçà de frontières stables eût inévitablement entraîné la désintégration de l'autorité centrale, celle-ci étant incapable de conserver le contrôle des instruments de guerre et de conquêtes qu'elle avait elle-même créés. Les possesseurs de fiefs eussent mis à profit les intervalles prolongés de paix pour s'implanter avec leurs familles dans leurs domaines; en même temps, les esclaves des armées eussent transféré leur allégeance à un autre sultan plus disposé à satisfaire leurs appétits et à reprendre cette succession interrompue de conquêtes et de razzias aux frontières. Même un sultan de la grandeur de Soliman dut prendre brutalement conscience de cette éventualité; en 1525, trois années sans guerroyer avaient fait naître des troubles graves chez les janissaires de Constantinople.
Paul Coles, La lutte contre les Turcs Flammarion,1969 pp.68-70
3 commentaires:
J’ai beaucoup apprécié vos efforts sur le fil de commentaires chez Pierre Assouline. En visitant furtivement votre site, j’ai remarqué "extrêmecentre" faisant partie de votre modeste blogroll.
Etant fidèle lecteur de ce dernier, je me suis permis de vous y faire une petite publicité :
http://extremecentre.org/2008/04/30/le-cauchemard-vychinsky-sylvain-gouguenheim/#comment-199579
Bonjour,
je ne pense pas, si la personne quia écrit ce texte est historienne, mais ça me paraît un peu tiré des cheveux.... on ne voit pas les sources sur lesquelles on s'appuie pour dire cela, et on se place du coté des "opprimés".... il faut être neutre en histoire, et citer ses sources. Je ne pense pas du tout que la situation décrite est vraie. Pourquoi alors les Juifs expulsés d'Espagne ont vécu dans l'Empire Ottoman pendant de si longues années, s'ils étaient spoliés, alors qu'en Europe ils essayaient de trouver un endroit pour éviter les violences ? je ne vais pas faire un topo, mais il existe de milliers d'exemples sur le fait que les Turcs n'étaient pas rudimentaires en arme (comment se fait il qu'ils aient pu construire l'Etat le plus puissant du monde à l'époque moderne ?)....
A anonyme 1 : je vous remercie pour votre geste.
Anonyme 2 :
1) Je vous conseille de vous reporter aux références que j'ai donné. Vous pourrez ainsi plus amplement prendre connaissance avec cet ouvrage et consulter les sept pages de bibliographie commentée. Paul Coles n'est pas historien et Braudel non plus.
2)L'extrait cité ci-dessus ne fait à aucun moment référence aux juifs mais à des territoires chrétiens.
3)Les juifs fuyant l'espagne ne sont pas seulement réfugiés dans l'empire ottoman mais aussi en hollande, france, grande bretagne suisse etc
4) Les turcs n'ont jamais développé un armement propre mais ont utilisé des techniques introduites souvent par des renégats.
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